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Lyon art paper

La Société lyonnaise des Beaux-Arts organise pour la deuxième année consécutive un salon du dessin. Belle initiative, aux intentions fort louables,  (selon Pierre Souchaud, « restaurer les échanges horizontaux, reconstruire les systèmes de reconnaissance en faisant tomber les nombreux murs de séparation qui sont apparus ces dernières années dans le paysage de l’art et qui en occultent la richesse et la diversité »),  mais qu’on a baptisé, pour faire sérieux sans doute, d’un très jargonnant et mondialisé « Lyon art paper »; un peu restreint et confidentiel l’an dernier, plus sûr de lui cette année, le salon trouve place dans le palais de Bondy rénové. 

Didier Estival, Sans titre.
Didier Estival, Sans titre.

 Un salon du dessin sur papier, seul dénominateur commun des 48 artistes, régionaux ou non, réunis dans les grandes salles restaurées de l'étage. De là, sans doute,  au-delà de la diversité des moyens - encre, stylo bille, crayon, sanguine, etc. - la diversité des esthétiques représentées ; le seul médium du papier rassemblant ces artistes laisse ouvertes toutes les portes à tous les styles possibles. 

D’autant que notre époque s’est éloignée de ce qu'est étymologiquement le « dessein »,  comme on l’orthographiait autrefois, c’est-à-dire un projet, une idée : comme le disait Michel-Ange, cité opportunément par Jacques Fabry dans la présentation du salon, le dessin est  « ce qui constitue la source et le corps de la peinture » ;  aujourd’hui le dessin est devenu un genre à part entière.

Sept artistes invités, personnalités reconnues, venues de Paris et d’ailleurs, ou de Lyon même comme Joseph Ciesla, qui montre de grandes feuilles crépusculaires d'où émergent et où luisent des formes propices à susciter la rêverie, donnent le la. 

Un jury a sélectionné une cinquantaine de candidats, et au final, presque deux tiers environ des artistes retenus viennent de Lyon et de sa région proche. On observe en passant qu’une bonne douzaine de participants se déclare autodidacte, ce qui mériterait plus ample considération. 

La tendance est au grand format, ce que l'amateur de papiers déplore : comment tenir en mains, comment caresser une feuille de plus d'un mètre carré ? Heureusement, il ne manque pas d’artistes pour user de formats plus raisonnables. 

 

Claire Borde, Eros, thanatos et le minotaure, (détail), eau-forte.
Claire Borde, Eros, thanatos et le minotaure, (détail), eau-forte.

On a fait, dit-on, le pari de la qualité et les œuvres présentées en témoignent : on peut apprécier la maîtrise de la technique, qu’il s’agisse de la sanguine pour Juliane Fuchs par exemple, ou de l'encre de chine pour David Trouilloux ; on mesure l’énergie du geste de des grands portraits très physiques de Florence Vernay, ou des quasi haïkus calligraphiques de Jacques Reverdy ; on verra aussi la justesse des scènes ou des récits complets, des portraits de famille, des natures mortes. Finalement, on voit beaucoup de figures, réalistes ou non, fantastiques ou monstrueuses, et souvent aussi les développement d’un imaginaire libéré, comme chez Daniel Flammer par exemple.

On trouve bien sûr des graveur(e)s : Claire Borde, à qui un carré de 4 centimètres suffit pour interroger et toucher, Isabelle Braemer qui dresse son énigmatique soldat face au spectateur et montre des portraits-masques étonnants, Didier Hamey, artiste invité, dont les « amulettes » à la pointe-sèche disent assez l’originalité, Besson Girard qu’on ne connaissait pas et que signale une grande planche séduisante et inquiétante, Dartmour aussi dont les estampes tissent comme des nervures ou des arborescences.

S’il faut dire des préférences, eh bien, on a aimé aussi les portraits de famille cruels et drôles de Didier Estival, les petites planches de Claire Borde bien sûr dont le dessin, dans l’eau-forte ou non, jaillit irrépressible et se joue des codes, le graphisme de Gilles Lizanet, et la finesse aérienne des ramures de Laurent Karagueusian.

Un salon qui mérite la visite.

P.B.

 

Lyon art paper, du 7 au16 octobre, Palais de Bondy, Lyon

 

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